Philomèle n’a
rien du poseur. Pas lui !
Pas du genre
à plastronner dans des surcots de parade, ni à marcher sur les avant-scènes en
vêtements de couleurs, plein d’arrogance, de couleurs et de fantaisies…
Non! Il est
plutôt timide ! En tout cas discret dans sa chemise longue, parfois crème et
sinon blanche. Et puis ce costume brun, croyez-moi, il en fera aussi bien son
dimanche que son ordinaire.
N’allez pas,
non plus, lui chercher une taille de guêpe qu’il n’a pas ; car si c’est d’un
séducteur que je parle, il aime aussi ses aises.
Ses pectoraux
rebondis, peut-être d’authentiques muscles - acquis à quelles luttes grandioses! (Allez savoir quand on a traversé la mer!) Ils lui vont bien, au moins, jusqu’à la
cuisse.
Il ne se
cherche vraiment de finesse qu’aux extrêmes.
Oui, n’en
déplaise à tous les lourdauds, il a la jambe fine et haute des danseurs
étoiles, et il creuse généralement la cambrure qui met en valeur une queue de
pie, souventes fois relevée.
Et enfin, à
l’autre extrême, appointe cet organe qui le distingue de tous….
Long et presque
pointu, c’est par là qu’il se fait apprécier, infatigable, de jour comme de
nuit, il y goûte avec liberté ses jouissances artistiques aussi bien que
ventrières.
Il n’a
pourtant rien d’un noceur ou d’un balourd de table, plutôt un gobeur de buffets:
trois miettes et quelques protéines lui font
un repas de noces…
Il préfère,
généralement, l’ombrée hospitalière d’une végétation folle, voire la
dissimulation d’un simple rosier, d’un tronc placide avec lequel il fait facilement corps, et là, il peut
enfin exercer son art.
Car c’est un
artiste, Philomèle, n’en déplaise aux efficaces et aux soucieux du rentable.
Philomèle
est un poète des sons, oui, il
improvise. Et pour dire des « Je t’aime » à sa façon, il minaude de la voix, ce finaud musardeur.
Pire encore, s’il est possible, c’est un artiste
amoureux ! Familier de la bohème -ou
plutôt grand voyageur !-, il se laisse volontiers séduire par les charmes
printaniers.
Et il y va,
le gaillard, trillant ses amours et ses langueurs d’exilé comme on quête la
pitié.
Oh !
Pas porté pour un sou à des idées. Non, ni même au sens de son infini discours,
Philomèle, lui, il se suffit du vocabulaire d’une variation de hauteur
mélodique autour de laquelle il sinue.
Il se
complet à la polysémie de cette pétillance qu’il explore volontiers jusqu’à la
perfection du modèle.
En un
concerto de phrases courtes et
cristallines qu’il finit en point d’orgue, il dit avec patience :
"Je suis
là, entends-moi, belle!"
Mieux même:
"Réponds-moi, Amour ! ».
Et Philomène
nous enivre, jusqu’à l’oubli, de dizaines d’envolées flûtées.
Il vous étourdit
jusqu’au profond des nuits, de répétitions en tonalités diverses, reprises,
toutes, comme le soliste en quête de l’exact et parfait crescendo : gringotteries,
oui ! Bien sûr !
Glissandos nocturnes aux accents flûtés.
Et pourtant,
bientôt, Philomèle deviendra traître à sa nature.
Oui, certains, jaloux sans
doute de sa bonne fortune, diront même qu’il est un peu queutard.
Il n’en est
rien, bien sûr, ou s’il l’est, ce n’est pas plus que vous et moi.
Vous aviez
fini par lui trouver chaque nuit, une voix, un timbre tout en parfaites nuances,
le voici qui se tait maintenant, dans
tout ce noir d’insomnies qui s’adoucit du printemps qui finit …
Depuis quand
ce silence, exactement ?
Pour oublier
le frémissement tendu de ses vocalises, ses délices d’enamouré fragilisé de
désir, Il lui aura suffi d’un irrésistible velouté plumeux, de quelques tressaillantes voluptés.
Depuis, Philomène
s’est installé en grave chargé d’âme.
En tout cas, presque jaloux, il va,
observateur prudent, posté dans le sillage des allées et venues de sa « choisie »,
toute occupée de meubler leur logis de fortune.
Elle vous fait décor d’un rien,
ou d’une feuille, parant, faute de moyens, les murs de leur unique pièce -
salon, salle à manger, chambre et nurserie-, de quelques graminées glanées dans
les champs alentour et posées en un limite désordre.
Philomèle,
disons-le tout net, guette le
signe : il attend qu’émergent de quatre à six grosses perles bleues, ovoïdes
et tachetées d’ocre ses talents de père, d’utile nourricier.
Philomèle
-en fait!- de chanteur, il ne l’aura été que le temps d’un désir!
Sa vie de
rossignol est plutôt, qu’on y regarde de tout près, celle du père-trouvère: en quête perpétuelle d’un bonheur qu'il ne sait chanter et qui comme un horizon le fuit et lui échappe.
Serge De La Torre (le 2 Mai 2016 à La Bégude de Mazenc)
Vous êtes autorisé à :
- Partager — copier, distribuer et communiquer le matériel par tous moyens et sous tous formats
- L'Offrant ne peut retirer les autorisations concédées par la licence tant que vous appliquez les termes de cette licence.
Selon les conditions suivantes :
- Attribution — Vous devez créditer l'Œuvre, intégrer un lien vers la licence et indiquer si des modifications ont été effectuées à l'Oeuvre. Vous devez indiquer ces informations par tous les moyens raisonnables, sans toutefois suggérer que l'Offrant vous soutient ou soutient la façon dont vous avez utilisé son Oeuvre.
- Pas d’Utilisation Commerciale — Vous n'êtes pas autorisé à faire un usage commercial de cette Oeuvre, tout ou partie du matériel la composant.
- Pas de modifications — Dans le cas où vous effectuez un remix, que vous transformez, ou créez à partir du matériel composant l'Oeuvre originale, vous n'êtes pas autorisé à distribuer ou mettre à disposition l'Oeuvre modifiée.
- Pas de restrictions complémentaires — Vous n'êtes pas autorisé à appliquer des conditions légales ou des mesures techniques qui restreindraient légalement autrui à utiliser l'Oeuvre dans les conditions décrites par la licence.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire