dimanche 23 septembre 2018

Comme un vent lourd...

                               

Claude Monet, Meules, 1891, huile sur toile, 73 x 92 cm, collection privée
                                         
Comme un vent lourd, il vous souffle, l’éclat de la lumière.

Il est mouvement,  
Force illuminante,
Et puis aussi énergie qui sauve.

Quel peintre saura-t-il mieux le rendre sur l’espace d’une toile,
Fusse par ses couleurs, par des touches épaisses ou serrées, et même par tout le détour de son art ?
Quel peintre saura-t-il donner la parfaite sensation vécue, sous une semblable flamboyance ?
Mille ont osé, tenté ; certains, bien plus rares ont fait merveille. 
Et pourtant toujours à nouveau, ils y reviennent : il est des chemins qu’il n’est possible de prendre que seul. Et bien au-delà de soi, toujours ! Des quêtes qui valent par l’effort que l’on fait, autant au moins que par le point où l’on arrive

Lumière jaillie d’un invisible foyer,
Et qui au ciel silencieux explose,
La meule comme une pyramide,
Alignée à ses voisines, te fait mur de sa paille sèche.
Et offre un semblant d’ombre
Où l’on s’abrite, voit et se repose.

Comme un vent, éclat de la lumière
Tu vas brisant les limites d’un objet qui finit
Dans celles où l’autre prend son essence,
Opposant simplement, à l’immobile, l’allant.

Dans l’œil qui vieillit, la fusion s’opère.
L‘éclat importe plus que ce qu’il éclaire.
Soudain le regard transperce
Jusqu’aux frontières devenues floues de la matière.

L’été brûle, les jours flamboient ;
Rien n’est plus dans ses propres limites 
:
Tout va un cours, invisible et fuyant,
Où l’empreinte de l’homme est plus grande
Que n’est, visiblement, sa présence.


            Paru sur la page 119 de l'Herbier de poésie : https://imagesreves.blogspot.com/2018/09/page-119-ca-brule.html?utm_source=feedburner&utm_medium=email&utm_campaign=Feed%3A+ImagesEtRves+%28Images+et+r%C3%AAves%29

samedi 15 septembre 2018

Étranges ballets, Dame Nature !

Dans les profondeurs,
Vos poissons nagent en banc,
Légers et mouvants,

Effets de nuages
Géométrie volatile
Ensembles vibrants,
Au-dessus de nous,
Avancent en processions
De si dignes nuages.

Amas gris de gaze ;
Ordonnés, sans cesse changeants :
Ils vont tous, au vent

Entre les deux,
Dans la roselière
En ronde harmonieuse,
Les étourneaux se tiennent
Dansant, du bout de l’aile 
Et au ras de l’eau,

Me reviennent en mémoire,
D’autres étourneaux, sur l’arbre,
Devant l’hôpital où tu naquis, ma fille ;
À chaque entrée, chaque sortie
S’envolaient en grappes
Ou en multitudes criardes.
De polissons oiseaux,
En cour de récréation.    
 
Serge De La Torre  


samedi 8 septembre 2018






Léonard Tsuguharu Foujita, Femme allongée, Youki, 1923, huile sur toile, 50 x 61cm, collection particulière © Fondation Foujita / ADAGP, Paris, 2018





Caresser le mutisme, de son pinceau

Comment dire sur ma toile l’essence où baignent tes poses, le matin. 
Ce vide qui sépare nos âmes et qui de même les lie?
Comment crier en couleurs, la merveille de la Vie derrière l’ordinaire des choses ?
Comment hurler en aplat cette souffrance qui se vit et nous embrasse, ma muse !
Comment rendre aussi ce vertige, lorsque s’ouvrent enfin grandes les portes closes :  la chute en figuration qui s’amorce est autant ce qui me brûle, que ce qui me fera grandir.
Allons !

Hurle fort le blanc !
Tendresse pâle qui signe
Ce qui, nu, s’expose.

Comment peindre le lumineux lait de ta peau, sur la soie écrue du drap froissé, sur le moelleux pâle de l’oreiller blessé ? 
Comment souligner ton regard de biche amoureuse, sous mon œil meurtrier d’amant-chasseur !
 Mon pinceau, beauté, te couche sur ma toile, t’aime d’un trait, d’un contraste, et peine à rendre l’amour dont, entière, il t’entoure et te couvre.
Allons…

Blanc ! Caresse-la!
Immaculée douceur, 
Cette âme entière. 

                                          Serge De La Torre

                                     Paru dans "L'Herbier de poésie":
          https://imagesreves.blogspot.com/2018/09/la-page-117-avec-le-peintre-foujita.html