jeudi 28 novembre 2019

Estampe indienne au Bois de Boulogne

Un seul geste suffit pour faire un chef d'oeuvre 
Au loin, un sombre couple d'amants, 
Crie à sa manière la  perfection du moment .
Pour eux, la mer est une perspective évadée. 

La vernale blancheur d'un bouquet, 
Vaut la grâce d'un genou en terre 
La main nue d'une élégante accroupie,
Met de l'or au paysage de soleil ébloui. 


Serge De La Torre

Maurice Denis, Avril (Les Anémones), 1891, Collection particulières
                         (Tous droits réservés © Paris, ADAGP, 2012)

samedi 23 novembre 2019

Sage ou passage ?


Le vieux sage du parc Monceau -photo Adamante-


Quoi ? D’une clôture, on voudrait me contraindre ?
Je ne suis pas de ceux-là, Madame. Je ne suis pas de ceux-ci, Monsieur. Immobile en tout point, je vais pourtant mon chemin, jeune fille ; mon beau jeune homme, je déroule tranquillement ma vie.


Ans et saisons passent
Et je pousse, m’étends
Je m’impose et m’étale.

Oui, plus de cent coudées en hauteur, plus de vingt, bientôt trente de tour de taille, j’en impose Ma Dame, je dispose d’arguments, Monsieur. Voyez ma ramure, cette volupté boursouflée de mon tronc.

Ma vie est aisance
Et plaisir aussi.
Je croîs, plein épanoui.
  
Dans mes branches et ma ramée, divers, bigarré : tout un peuple. Oiseaux, vers et fourmis ! Tout un chacun trouve en moi le gîte, et la plupart jusqu’au couvert. Pas un que je rejette, pas un que je renie. Et moi, moi, je suis leur roi, je suis leur toit, je suis moi. Ans et saisons passent, les gens aussi. Et moi, je demeure et vous salue d’un souffle d’ombre Ma Belle, d’un simple bruit Mon Joli.

Et deux cents ans d’âge
Dit d’Orient, je suis :
Vieux sage au Bois Monceau.

Mais qu’entends-je ? Quel est ce bruit ? Grincement de dents métalliques et bruits de chaîne glacée. Odieuse odeur d’une huile brûlée et chant de mort de l’autre qu’on assassine, oui, cri de silence de l’arbre qu’on abat et qui meurt.

Qui sera le suivant ?
Ne serait-il pas pour moi ?
Ce crissement de fer ?
Grondement de mort :
Tronçonneuse qu’on affûte,
Outil maudit qui, sadique, par avance et dans la fureur jouit !  

Sauvez le Platane, sauvez le Platane du Parc Monceau ! Qu’on me protège, et qu’on m’enferme, s’il vous plait Mesdames ! D’un grillage, d’une barrière, d’un haut mur s’il le faut, mes amis ! Je suis trop jeune encore, je suis si beau !


Qu’on m’oublie… m’oublie :
Loin de moi la scie,
Et loin l’échafaud !



Vincent mon frère, Vincent mon ami,



Tu t'en es allé Vincent, selon ton habitude …
Comme une étoile filante….
C’est sûr, mon ami,
Tu fus un géant. 
Tu allais à ton art 
Comme nos pères allaient à la mine : 
Le visage grave, et le regard parfois perdu, 
Et dans ta barbe hirsute,
Tu marmonnais en marchant,
Des sentences de sage, 
Que tu avais, à la dure,
-Dans une si grande solitude-, apprises : 

« N’oublions pas que les petites émotions 
Sont les grands capitaines de nos vies,
Et qu’à celles-ci, nous obéissons sans le savoir ».

Tu vibrais, Vincent, avec les étoiles que tu peignais,
Mais qu’aurions-nous du attendre d’autre, du génie ? 
N’est ce point toi qui m’écrivis un soir : 

« Je vis une clarté effrayante 
Au cours des moments où la nature est si belle. 
Je ne suis plus conscient de moi-même 
Et les images m’arrivent comme dans un rêve. »

Oh Vincent mon frère, oh Vincent mon ami !
Il est de doctes savants qui s’étonnent, 
Eh oui, mon frère, 
Qui s’étonnent, eh oui mon ami !
Que tu n’aies su atteindre au mystère,
 Qu’aux pires heures du chemin …
Aux pires moments, de ta vie :  
Au seul cœur des plus sombres de tes échappées,
Au plus noir du pays de ta mélancolie ? 
Oublient-ils ce que quelque jour tu nous prédis ?  

« Il faut pouvoir vivre d’un morceau de pain, 
Tout en travaillant toute la journée, 
Et en ayant encore la force de fumer,
Et de boire son verre, 
Il faut ça dans ces conditions. 
Et sentir néanmoins les étoiles 
Et l’infini en haut clairement. 
Alors la vie est tout de même presque enchantée ».

Tu vibrais ces jours-là, 
Jours de gloire et jours maudits,
Au diapason de ces constellations,
 Où ton œil comme le nôtre,
 N’était jamais encore allé ? 
Bien sûr Vincent, bien sûr mon ami ! 
L’âme humaine est un microcosme
Où se reflètent tous les infinis ?
Les alchimistes le disaient déjà, 
Et qui donc oserait, après toi, en douter ? 
Et quoi, ? Que semblable connaissance ait pu
 Te faire dépasser nos ordinaires prudences ?  
Ne nous as-tu pas dit un jour : 

« La normalité est une route pavée : 
On y marche aisément, 
Mais les fleurs n’y poussent pas. »

D’autres tout semblablement doctes s’étonnent 
Que le mystère des galaxies ait pu t’échapper,
 Lorsque tu choisissais d’être plus simplement, 
Plus heureusement des nôtres. 
Tu restais pourtant artiste, mon Vincent,
Tu ne faisais alors qu’œuvre plus humaine :  
Et tu nous confiais, alors, en quelques mots
Ton amour maladroit, ton amour d’ homme : 

« Dans un tableau, je voudrais dire
Quelque chose de consolant comme une musique (…)
Il n'y a rien de plus réellement artistique
Que d'aimer les gens.”

Et te rends-tu compte Vincent, 
Tu voyais juste encore, mon ami , mon frère ! 
Toi qui m’envoyas un jour ce message prophétique : 

« La science – le raisonnement scientifique – 
Me parait être un instrument
Qui ira bien loin dans la suite. (…)
Des générations futures, il est probable, 
Nous éclairciront à ce sujet si intéressant ; 
Et alors la Science elle-même pourrait – 
Ne lui déplaise – arriver à des conclusions 
Plus ou moins parallèles aux dictions du Christ 
Relatives à l’autre moitié de l’existence. »



Te voici parti mon frère, rejoindre tes étoiles,
 Définitivement entré dans ta nuit.
Faut-il que je m’en étonne ?
Toi qui n’a jamais été que sur le départ,
Hasardeusement posé parmi nous :

     « Cela m’intéresse infiniment,
     Mais une chose complète:
     Une perfection nous rend l’infini tangible ;
     Et jouir d’une telle chose,
    C’est comme le coït, le moment de l’infini. (…) »
    « On commence à saisir alors que la vie
     N’est qu'une espèce de période de fumage,
     Et que la récolte n'est pas de ce monde. »
     Dans la vie du peintre peut-être la mort
     N’est-elle pas ce qu’il y aurait de plus difficile.
     Moi je déclare ne pas en savoir quoi que ce soit, 
    Mais toujours la vue des étoiles me fait rêver 
    Aussi simplement que me donnent à rêver 
    Les points noirs représentant 
    Sur la carte géographique, villes et villages. »

Adieu Vincent, adieu mon frère, adieu mon ami, 
                                  Serge De La Torre

                                           A Vincent Van Gogh
                        Par la voix de Théo, son frère et meilleur ami…

jeudi 21 novembre 2019

Le temps de l'avent

                                   Silence et roulements de tambour,

J'ai longtemps été en attente de cet heure et surtout de ce résultat de mon écriture,
Suspendu à un respire que je retenais,
à une inspiration que  je me suis longtemps refusée.



Des presses de l'imprimerie,
Sortent aujourd'hui chaque jour, lentement, un à un,
Les exemplaires de mon livre
 "CHEMINS VIVANTS".

Un livre écrit, pourtant, n'est rien.
Sinon une promesse,
Il ne devient complet que dans le coeur
De qui le recréée de sa lecture,
De son imagination,
Et de sa poésie propre.

Alors, partagez!
Osez et donnez le doux frisson !

Le temps venu, (Noël arrive!)
Courez, s'il vous plaît, vous offrir,
Ou courez offrir à qui vous voulez,
- A "qui", aussi vous aimez!-,
Ce recueil glané sur les chemins de la Vie :
Vous y trouverez : Poésies, nouvelles, contes et tableaux.
Autant de plaisirs à goûter à petites doses ou par grandes lampées.




Vous trouverez ce recueil où j'ai mis beaucoup de coeur et beaucoup de moi-même sur Iggybook, à la FNAC, sur AMAZON, chez Hachette, chez Chapitre.com, Babelio et chez bien d'autres bons libraires ou marchands de livres .

Et pour une preuve d'achat de la version papier, envoyée dans les trois mois à mon adresse mail, je vous offre, en cadeau, l'ebook du même livre avec un mail dédicacé.

Ainsi pourrez-vous lire et faire lire : 
Deux plaisirs, certes, différents . 
Deux plaisirs auxquels, en tout cas,  je vous invite,
 si vous ne connaissez pas encore ce livre! 

mardi 19 novembre 2019

Les tournesols sur le sable

Bestiaire sur le sable des Lofoten-Photo tirée de "Didier Larive "bestiaire sur le sable et autres photos prises au lofoten - Norvège-" in http://passeportpourlemonde.fr/2017/03/instants-magique-d-un-hiver-aux-lofoten.html


Les tournesols sur le sable*

Du néant émergent parfois d’incroyables figures,
Un dais de sable en hiver vous révèle une merveille,
Sans dessein aucun, la nature organise ses possibles,
Et fait émerger de rien, quelqu’incroyable folie.

Comme si la beauté était un hasard nécessaire,
Une préfiguration signifiante d’un invisible sans forme :
Une donnée organisée qui se dévoile par surprise
Et qui s’offre au regard, s’il en est un pour la saisir.

Chevelures de sirènes, algues flottantes,
Ronds sur la glace, plages lavées à grandes eaux :
Ainsi émergent sur les Iles Lofoten de Norvège,
Des tournesols que n’auraient pas reniés Van Gogh.

Serge De La Torre

* Poésie initialement parue dans "L'Herbier de poésie" 
https://imagesreves.blogspot.com/2019/11/voici-la-page-153.html?utm_source=feedburner&utm_medium=email&utm_campaign=Feed%3A+ImagesEtRves+%28Images+et+r%C3%AAves%29